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Analyse – L’essai de Jean-Baptiste Dubié était-il valable ?

Lors de la dernière journée du Top 14 un des essais de la rencontre entre Bordeaux et Toulon a soulevé de nombreuses remarques de la part des spectateurs. Si l’on s’en réfère aux « lignes » du terrain ou plutôt aux différences de couleurs de la pelouse, les ralentis sont évidents, la passe est en-avant. Pourtant l’essai est accordé. Dans le rugby ce cas de figure n’est pas rare, sauf que les décisions arbitrales s’opposent parfois. Qu’en est-il vraiment ? L’essai de Jean-Baptiste Dubié était-il valable ? Réponse.

En s’appuyant sur l’image ci-dessous, le constat parait simple. Etant donné que le point de chute du ballon est devant son point de départ, la passe semble en-avant. Même a vitesse réelle, on a la forte impression que le ballon se dirige vers l’avant. Voici la règle : « Il y a passe en avant lorsqu’un joueur lance ou passe le ballon en avant, c.-à-d. si le mouvement des bras du joueur qui passe le ballon se dirige vers la ligne de ballon mort adverse. » Déjà un premier élément vient remettre en question cet « en-avant. » Même en y regardant de très près sur les ralentis, les mains de Nans Ducuing ne vont pas, ostensiblement, vers la ligne de ballon mort de Toulon.

L’autre élément important va cette fois changer légèrement votre façon de voir le rugby. Il y a quelques années World Rugby (IRB à l’époque) avait réalisé un test pour démontrer qu’un joueur pouvait faire un « en-avant » alors que sa passe va vers l’arrière. Quand un joueur porte le ballon, il lui donne une force, une direction et une vitesse. Par conséquent il faut comprendre que ces éléments font toujours effet sur le ballon quand celui-ci est transmit vers un autre joueur. Pour faire simple, le ballon garde son inertie. De plus on a tendance à garder comme point de référence le départ du ballon c’est à dire le joueur. Quand le lanceur continue sa course, l’en-avant est imperceptible. L’exemple est frappant ci-dessous. Le joueur passe la balle vers l’arrière mais le ballon arrive avec une différence de deux mètres entre le point de départ et le point d’arrivé.

  

Cependant lorsque le joueur se fait percuter et que sa course s’arrête subitement, comme c’est le cas pour Nans Ducuing quand il donne le ballon à Dubié, le point de référence s’arrête lui aussi et l’en-avant parait évident ! Pourtant l’intention du joueur est d »envoyer le ballon vers l’arrière et ses mains vont vers l’arrière. Dans ses instructions, World Rugby demande aux arbitres de ne pas regarder le point de chute mais le point de départ du ballon pour déterminer s’il y a en-avant ou non. Lorsque les mains vont vers l’arrière il n’y a pas en-avant même si le ballon semble aller vers l’avant. L’arbitre de la rencontre a donc bien fait d’accorder cet essai car il était bien valable.

 

*A noter que cette analyse est aussi valable pour la passe juste avant celle-ci. La problématique est la même pour la passe entre Spence et Ducuing que pour la passe entre Ducuing et Dubié. De plus l’angle de caméra accentue cet effet de passe vers l’avant.